La Côte d’Ivoire fait partie des pays à fort ratio de mortalité maternelle en Afrique de l’Ouest et du Centre. Elle connaît un ratio de mortalité maternelle de 614 pour 100 000 naissances vivantes. Une proportion importante de ces décès est due aux avortements clandestins. Cependant, bien qu’il soit difficile d’estimer de manière précise ce phénomène, étant donné son caractère illégal, on estime entre 210 mille et 280 mille avortements qui ont lieu chaque année en Côte d’Ivoire.


Selon les résultats de l’étude de Benie and al, plus de la moitié de ces avortements (52,1%) ont été réalisés par des tradipraticiens ou par automédication avec des plantes et des décoctions diverses.

Les principales raisons évoquées étaient la crainte de la réaction des parents dans 27,7% des cas; l’âge (22,2%); le manque de ressources financières dans 21,3% des cas et le désir de ces jeunes filles de poursuivre leur scolarité. A ces raisons s’ajoutent les représentations sociales autour des grossesses rapprochées (pour les femmes vivant en couple) qui favorisent le choix de l’avortement. Il faut aussi noter que les jeunes femmes en question sont dans l’incapacité d’assumer cette responsabilité tenant compte du déni de la grossesse par l’auteur et la volonté de maintenir le lien social avec la famille.

Les sources d’information sur les options d’avortement qui s’offrent à elles se présentent sous la forme de témoignages (pour les vendeurs de médicaments chinois), le statut et la proximité sociale (avec les prestataires de santé) de la femme en demande et, enfin, le foisonnement de cliniques et infirmeries privées.

Explosion de grossesses non désirées à craindre avec la survenue de la Covid-19

Une explosion de grossesses non désirées est à craindre en Côte d’Ivoire, au regard de la baisse de fréquentation des services de santé sexuelle et reproductive, suite à la pandémie de la Covid-19. Ce constat est de Dr. Sosthène Dougrou, Directeur régional Afrique francophone de IPAS. Ce dernier s’exprimait en marge d’une rencontre d’échanges, à Abidjan, avec une plateforme des organisations de la société civile, dans le cadre de la promotion du protocole de Maputo.

A en croire le praticien, l’impact de la pandémie de la Covid-19 sur la santé sexuelle et reproductive est réel, bien qu’il n’y ait pas encore d’étude poussée, mais l’expérience montre que les taux de fréquentation des structures sanitaires baissent drastiquement.

Pour lui, “il est à craindre que les avortements augmentent pendant et après cette période de la Covid-19, parce qu’il n’y a plus de planification familiale ou parce que l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive est difficile”. Ceci s’explique, toujours selon Dr. Dougrou, par le fait que la priorité du gouvernement, à l’heure actuelle, est portée sur la crise sanitaire de la Covid-19, avec l’achat ou la commande de masques, de réactifs pour détecter le virus vu la situation d’urgence. Tout en ajoutant que l’Etat devrait garder à l’œil les besoins contraceptifs.

“En Côte d’Ivoire, regrette Dr. Sosthène Dougrou, 20% des femmes décèdent à la suite d’avortements non sécurisés.

Au niveau des formations sanitaires, IPAS a formé en Côte d’Ivoire, à ce jour, 108 prestataires en planification familiale et 120 en évacuation utérine. Par ailleurs, IPAS est en train de former 100 agents de santé communautaires qui vont travailler en collaboration avec les 240 prestataires que IPAS a l’intention de former d’ici la fin du projet R3M.

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Le cas unique de la clinique médicale Fémina

Depuis 1988, la Clinique médicale Fémina est une clinique réputée offrant des services d’avortements pour le premier trimestre de la grossesse. Cette clinique offre aussi le service de dilatation et curetage pour un diagnostic de grossesse arrêtée.

À la Clinique médicale Fémina, la patiente a l’opportunité de choisir entre l’avortement chirurgical ou l’avortement médicamenteux. L’avortement chirurgical à la Clinique médicale Fémina est fait par la méthode de dilatation, aspiration et curetage et dure environ 8 à 10 minutes. Grâce aux médicaments utilisés durant l’intervention, la douleur est minime. Pour sa part, l’avortement par médicaments est pratiqué à l’aide de mifépristone, qui arrête la grossesse, et de misoprostol, qui expulse la grossesse. Le processus d’expulsion peut prendre plusieurs heures.

L’AIBEF et le projet LAD

L’Association ivoirienne pour le bien-être familial (AIBEF) a officiellement lancé son projet Large Anonym Donator (LAD), le mardi 1er octobre 2019, en vue de réduire la mortalité et la morbidité maternelles à travers l’extension de l’accès aux soins complets de l’avortement et aux soins après avortement (SAA).

Ce projet permet, entre autres, à l’AIBEF d’offrir des soins complets en matière d’avortement, des services de contraception après avortement et des services continus de contraception de longue durée d’action et aussi renforcer les systèmes de gestion et d’information sur les soins post-avortements.

Le nombre insuffisant des prestations de services et des centres de santé offrant ce service, la crainte de recourir aux services en raison de la stigmatisation généralisée des avortements, le manque de confidentialité des structures publiques et le manque d’informations sur les soins après avortements sont des obstacles à l’accès aux soins d’avortement. Mais, selon les responsables de l’AIBEF, le projet LAD a pour but d’améliorer la prise en charge de l’après avortement.

Marcellin Boguy, journaliste ivoirien

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